Le 27 mars, le gouvernement du Burkina Faso a annoncé la suspension immédiate de la diffusion de France 24 sur son territoire, à la suite d'une interview controversée du chef d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), Abou Obeida Youssef al-Annabi, diffusée par la chaîne d'informations française. Le gouvernement burkinabè, par l'intermédiaire de son porte-parole Jean-Emmanuel Ouedraogo, a condamné cette interview, la qualifiant de « légitimation des actions terroristes et des discours de haine » et accusant France 24 de servir d'« agence de communication » pour des organisations terroristes.
Cette décision s'inscrit dans un contexte de tensions croissantes entre le Burkina Faso et la France, exacerbées par la détérioration des relations bilatérales depuis l'arrivée au pouvoir du capitaine Ibrahim Traoré, à la suite d'un coup d'État en septembre 2022. Le gouvernement burkinabè, déterminé à diversifier ses partenariats internationaux pour lutter contre le terrorisme, a multiplié les mesures symboliques et diplomatiques, notamment en exigeant le départ de la force française Sabre en janvier 2023 et en dénonçant un accord d'assistance militaire datant de 1961.
La diffusion, le 6 mars, des réponses écrites du chef d'AQMI à une série de questions posées par Wassim Nasr, journaliste de France 24 spécialisé dans les questions djihadistes, a été perçue par les autorités burkinabè comme une provocation, d'autant plus que le Burkina Faso est en proie à une recrudescence des attaques djihadistes depuis 2015. Ces violences, perpétrées par des groupes affiliés à Daesh et à Al-Qaïda, ont causé la mort de 10 000 personnes et déplacé environ deux millions de personnes, selon les estimations des ONG.
Le gouvernement burkinabè avait déjà suspendu, en décembre 2022, la diffusion de Radio France Internationale (RFI), qui appartient au même groupe que France 24, France Médias Monde. RFI avait été accusée d'avoir relayé un « message d’intimidation » attribué à un chef terroriste.
En réaction à la suspension de sa diffusion, France 24 a fermement rejeté les accusations du gouvernement burkinabè, dénonçant des propos « outranciers et diffamatoires » et réaffirmant son engagement en faveur de la liberté d'informer et du professionnalisme de ses journalistes. La chaîne a également souligné son indépendance éditoriale et son attachement à une information équilibrée et rigoureuse.
Cette suspension de France 24 au Burkina Faso s'ajoute à celle déjà en vigueur au Mali, illustrant un durcissement des relations entre certains pays d'Afrique de l'Ouest et les médias français, dans un contexte de lutte acharnée contre les groupes djihadistes et de réévaluation des alliances internationales.